Sur le Gué

Publiée le 15/07/2022
C'est l'attente. Le temps de la réflexion, du dessin et de micro aventures qui peuvent donner à penser le monde. Je suis donc à mon affaire.

C'est la période des abricots
J'ai fait 2 pots de confiture
Il y a aussi les fruits rouges
Il y a toujours toutes sortes de verdures, mais bizarrement pas de salade
Les poissons du lac Sevan, je n'en n'ai pas achetés
Les pigeons non plus
Que faire ?
Prendre un peu de hauteur
Pas d'inquiétude, la mécanique est solide
Se baigner ?
Aller au théâtre. Pourquoi pas ?
Les larmes aux yeux.. Moi aussi bien sûr

L'Arménie profonde

La dizaine de spectateurs dans cette petite salle voûtée et obscure étaient visiblement très émue. Le Rimmel coulait. Les kleenex sortaient des sacs. Il est vrai que l'interprétation était magistrale. Heureusement j'avais demandé de quoi il s'agissait avant de prendre mon billet. "L'émigration".  Les protagonistes n'étaient pas des moutons mais cela m'intéressait car,  comme vous l'avez compris depuis longtemps l'histoire des moutons est,  quelque part, une métaphore sur notre condition humaine (pourtant, depuis que je les traque dans la montagne armenienne je me demande si le sort des moutons ne me touche pas plus que celui des humains. La différence entre les moutons et les humains ? Ils n'ont pas le choix et leur sort est plié. et il est loin d'être enviable. Vous le comprendrez plus loin).

Pour revenir à la pièce :un condensé d'Arménie. Le rapport mère fils. Les rituels autour de la nourriture. La religion. La survie, ici ou ailleurs ? L'attachement indéfectible au pays natal et à la mère. Tout cela en 1h émaillée de couplets de la chanson d'Aznavour "Elle va mourir la mama". 

J'ai vu  les jardins "sauvages" qui se glissent le long des trottoirs
Gilles Clément a dû s'inspirer  de ces pays
Je n'ai pas fait qu'arpenter les rues
J'ai aussi taillé mes crayons
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Revenir aux fondamentaux

Garnik m'a fait passer les rush déjà tournés. J'aurais bien tenté un petit montage à partir de cette matière. malheureusement  le format des fichiers ne convient pas au programme de mon logiciel. Le plan B c'est le dessin. 

Le projet de montage a partir des rush.
Je suis retournée chez Buniat
Direction la frontière turque
C'est l'été
L'eau du Caucase
Le village est  juste derrière cette petite côte.
Le panneau ne donne pas vraiment l'information attendue.
La montagne est toute blanche
A mon arrivée, pas de coup de pied aux fesses.
L'énorme berger du Caucase noir à la fois effrayant et fascinant  , n'est plus là.
Les tombes à quelques mètres de la maison

Une terre et des hommes

La mère de Buniat a l'air heureuse de s'occuper de moi et de me nourrir. C'est la fonction de la femme arménienne. Il y a dans les gestes et la  façon de déplier une nappe toujours immaculée sur n'importe quel support un peu branlant, et de déposer la vaisselle et les plats, une évocation du rituel religieux. Comment refuser de communier? Il y a aussi le fait que les femmes sont rares dans ce lieu. L'environnement est masculin : le père, les travailleurs saisonniers, les voisins, les amis de Buniat... Nous en avons parlé. Toute dévouée au projet de son fils qui a acheté ces 300 hectares de terre il y a une dizaine d'année, elle ne se plaint pas et se dévoue entièrement à la cause dans des conditions matérielles  très limites. J'ai fait le tour du potager, admiré les chiens puis rejoint le père qui rentrait un petit troupeau d'agneaux et décidé de repartir (je m'étais renseignée sur l'heure du retour à mon arrivée au village proche). Il n'en n'était pas question : Buniat redescendait à Gyumri en fin de journée il me raccompagnerait. Un peu effrayée par le temps d'attente j'ai décidé d'aller voir  un peu plus loin, vers ces pierres plantées qui ressemblaient à un cimetière à quelques mètres de la maison. 

C'est là que le père m'a rejointe et que nous avons longuement discuté. La conversation a inévitablement déviée, à un moment donné, vers la question de la terre et de la guerre. Je rappelle que nous sommes dans une sorte de camp retranché, la frontière turque  est au bout du chemin et les moutons doivent la franchir sous l'oeil des militaires pour aller pacager, la Géorgie est à quelques kilomètres et l'Azerbaïdjan avec lequel l'Arménie est en guerre, guère plus loin. Je ne développerai pas le contenu de cet entretien, tout en circonvolutions, mais je m'arrêterai seulement sur un point. A la question  "Qu'est-ce qui est le plus important? La terre ou vos enfants qui vont se faire tuer pour défendre cette terre? Devant ce dilemme , l'interlocuteur  inévitablement esquive la question : "Buniat est allé se battre et il y retournera s'il le faut".

Le soleil est descendu et les moutons sont rentrés
Buniat marque les moutons
Destination Qatar
Nous rentrons au coucher du soleil.

Daha

Je voulais faire la connaissance de Daha. Daha est la fille de Mikhael, le galiériste que j'avais rencontré à Perm dans l'Oural lors de mon précédent voyage. Mikhael m'avait proposé une résidence d'artiste dans sa datcha. Daha a 31 ans .Elle est graphiste designer. Comme beaucoup de jeunes russes , elle a  quitté son pays suite aux sanctions qui les ont privé de travail : ils étaient employés par des entreprises américaines. Elle aussi a laissé, son histoire sans regret.  pris son ordinateur et son sac de voyage pour rejoindre l'Arménie où sa carte  bleue fonctionne. L'entreprise a délocalisé dans différentes capitales européennes (Erevan est l'une d'elle) mais elle voudrait, à l'automne, se rendre à Barcelone. Elle est lumineuse  et elle a du talent. La vie est devant elle . Suite à l'école d'art de St Petersbourg elle a pris l'option numérique. Spécialisée dans le stop motion elle réalise des clip et des dessins animés. J'ai voulu voir son travail . Son site a été bloqué par la Russie, il n'est pas accessible et il va falloir qu'elle le reconstruise. Qu'à cela ne tienne, elle est citoyenne du monde. Ca fait du bien de rencontrer cette belle jeunesse qui a lâché prise et ne revendique rien; sinon d'être libre et de pouvoir travailler..

Mikhael

Marat Gelman

https://en-m-wikipedia-org.translate.goog/wiki/Marat_Gelman?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc


Je n'avais jamais entendu parler de ce personnage, ce qui a eu l'air de surprendre Daha. Alors, comme tous les ignorants, je suis allée voir sur internet. Me voilà rassurée, Mikhael n'a pas trahi ses convictions. Si votre curiosité vous pousse à aller sur le site,  vous comprendrez que cet homme d'origine moldave est de tous les combats pour défendre l'art contemporain russe et ukrainien. Il a délocalisé au Montenegro. Mikhael m'a proposé de venir les voir. Evidemment, c'est une aubaine qui me permettra de boucler mon tour; Je pourrais rentrer par la Turquie et l'Albanie, projet qui avait été interrompu; l'année dernière à la même époque. C'est rigolo comment les affaires se tricotent.


Daha

Notre prochaine rencontre

Nous devrions parler cinéma. 

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