La croisière vers les Komodo, du rêve au cauchemar

Publiée le 13/01/2017
14-17/11/2016 : 4 jours de croisière pour relier Lombok à Florès en passant par le parc marin de Komodo. En théorie un magnifique périple, en pratique cela a été entaché par les problèmes de santé qu'a déclaré Guillaume

> JOUR 1

Nous repartons en bateau depuis Gili T pour aller à Bangsai Harbor, sur Lombok, un port sans intérêt mais où nous avons rendez-vous avec la compagnie avec laquelle nous partons faire notre croisière de 4 jours vers les Komodo. Pour vous situer le contexte, ces croisières se font sur de petits bateaux tous simples, sans cabine, on dort sur le pont sur des matelas en mousse alignés en rang d’oignons. Pas de salle de bain, une petite cabine avec un trou dans le sol fait office de toilettes. Pourquoi s’imposer ça ? Car on longe l’ile de Sumbawa, puis traverse le parc marin de Komodo, ce qui permet entre autre de nombreux arrêts sur des plages merveilleuses, des sessions de snorkeling, et une visite des iles de Komodo et Rinca, qui abritent les fameux dragons de Komodo, et tout ça pour environ 200€.

On retrouve donc la compagnie au point de rendez-vous, après avoir évité une nouvelle arnaque à peine arrivées au port. Nous prenons un bus qui nous amène à Sengiggi où Guillaume a passé la nuit, nous allons pouvoir le retrouver. Arrivés là-bas, je vais le chercher à son hôtel. Je suis très soulagée de le retrouver et qu’il aille bien, je me suis un peu inquiétée les derniers jours en voyant le mauvais temps au-dessus du Rinjani. Finalement, même si c’était dur, il a adoré son expérience mais est encore très fatigué. On va également récupérer les autres participants. Nous espérions très fort un groupe sympa avec qui nous partagerions cette expérience mais ça s’annonce très mal puisque le groupe est composé d’une dizaine de personnes originaires de Lettonie, dont la grosse partie ne parle pas anglais, une hongroise et un français qui refusera de nous adresser la parole pendant les 4 jours car nous sommes français (au point de ne même pas s’excuser quand il nous bousculera, ce qui lui vaudra la palme du plus gros con que nous ayons croisé pendant ce voyage), première petite déception, tant pis nous resterons tous les 3. Après avoir traversé l’ile jusqu’à Labuan Lombok, nous montons enfin dans notre bateau. Comme attendu c’est très sommaire, ça nous fait bizarre de se dire que nous allons passer les 4 prochains jours dans si peu d’espace, mais bon, nous avons signé pour ça. Ce que nous redoutons le plus, bien au-delà du manque de confort, c’est d’essuyer une grosse houle pendant la croisière, et d’être malade pendant des heures. Nous avons lu que c’était arrivé plusieurs fois à des voyageurs, et nous croisons donc fort les doigts pour que nous échappions à ça.

Le bateau commence donc à naviguer. Après avoir récupéré les quelques affaires dont nous ayons besoin pour ces quelques jours, nous mettons nos grosses valises dans la cale du bateau. Pour ce premier après-midi, pas d’arrêt prévu, juste de la navigation. Nous nous éloignons doucement de Lombok, et on voit le soleil se coucher derrière le Rinjani, le spectacle est très beau et on en profite pour boire une bière en regardant ça. Guillaume, toujours très fatigué, est un peu fiévreux, il ne se sent pas au top. On met ça sur le compte de l’effort énorme qu’il a fourni ces derniers jours. Nous prenons un repas (vraiment pas mal au vu de ce qu’on attendait, tous les jours nous aurons des plats différents, avec des fruits en dessert !) et Guillaume prend un doliprane et part se coucher directement, ayant toujours un peu de fièvre. C’est dû à la fatigue et ça ira mieux le lendemain. Enfin, c’est ce qu’on croyait, car le lendemain Guillaume se réveille brulant de température et complétement courbaturé.

Présentation du bateau
Guillaume, avant le black-out
Coucher de soleil sur le Rinjani

> JOUR 2

La nuit a en plus été assez difficile à cause de la chaleur, et surtout parce que le bateau a repris la navigation à 2h du matin. Le moteur faisant un bruit énorme, nous n’avons dormi que d’une oreille. Evidemment Guillaume se sent en plus très mal et ne veut pas descendre du bateau pour le premier arrêt. Il reprend un doliprane et reste allongé pendant que nous allons sur Moyo island. Nous marchons 10 minutes dans la forêt pour arriver à une cascade qui n’est vraiment pas dingue, où on pourra se baigner un peu. Caroline et moi repartirons finalement vers la plage pour faire un peu de snorkeling, les fonds marins étant vraiment magnifiques. Retour sur le bateau, le doliprane de Guillaume a fait effet 2h, mais la fièvre commence à remonter. On se demande s’il n’a pas attrapé la dengue (dont le principal symptôme est une très grosse fièvre) qui sévit pas mal en Asie. La maladie se propageant par les moustiques, elle est souvent associée à la saison des pluies, et vu la météo des derniers temps, on ne serait pas surpris d’être en pleine épidémie. Dans n’importe quel autre contexte, on serait allé voir un médecin rapidement, mais là on est coincé sur un bateau. Heureusement on a une trousse à pharmacie très conséquente, justement constituée pour pouvoir être un peu autonome s’il nous arrive quelque chose dans une région un peu isolée. Le bateau repart et nous nous arrêtons à Satonda island pour faire du snorkeling. A nouveau Guillaume reste dans le bateau et Caroline et moi partons avec masque et tuba explorer les fonds marins. On se balade et on voit pas mal de poissons et coraux, c’est très joli. Nous survolons des coraux par seulement 1m de fond quand soudain j’aperçois un petit requin. C’est un requin de récif à pointe noire qui fait environ 60-80cm. Le temps de le montrer à Caro il a disparu… Mais il revient quelques minutes plus tard et nage à coté de nous un moment, visiblement aussi curieux que nous. On continue à se balader un moment et on repart finalement sur le bateau. Je réalise que j’ai oublié de mettre de la crème solaire, et la sanction est irrévocable, j’ai de gros coups de soleil sur les cuisses.

L’après-midi Guillaume déclare une grosse diarrhée, en plus de sa fièvre qui est toujours aussi importante. On se rend compte qu’il a attrapé quelque chose de vraiment conséquent. On se décide à parler au guide pour lui dire qu’il doit voir un médecin, mais il nous dit que ce ne sera pas possible avant d’arriver à Labuan Bajo à Florès, notre destination, car nous sommes au large de Sumbawa et qu’il n’y a pas de médecin ici. L’ile est en effet assez reculée donc ce n’est pas surprenant, mais cela nous inquiète d’autant plus. A la vitesse à laquelle ça évolue, comment sera-t-il demain ? et après demain ? On n’est pas rassuré du tout.

La nuit tombe et la mer commence à s’agiter. Nous nous retrouvons à attacher les affaires pour éviter qu’elles ne tombent à l’eau. La fièvre est toujours très importante (39.5 de température ce soir-là) ce qui semble laisser présager une grosse infection. Nous avons dans la pharmacie des antibiotiques large spectre et je me dis que, ne sachant pas ce qu’il a, il faudrait tenter ça. Caroline commence à se sentir mal à cause de la houle et part se coucher après avoir mis un patch contre le mal de mer. Je dois alors récupérer des médicaments dans notre pharmacie, qui est dans la valise, qui est-elle même dans la cale du bateau…

Je descends donc dedans, alors que le bateau tangue (et que je me sens mal dès que je lâche des yeux l’horizon pendant plus de 10 secondes). La cale est très basse, il faut être accroupi. Il fait une chaleur à mourir et le moteur pue de manière atroce. Je dois alors ouvrir les 3 cadenas à code qui ferment notre valise les uns après les autres, puis fouiller dans la pharmacie, tout ça à la lueur de la frontale. En ressortant de la cale je ne me sens plus très bien non plus. Je donne l’antibiotique à Guillaume, qui ne le supporte pas et vomit 20 minutes après… Je lui mets un linge humide sur le front, pour essayer de faire baisser un peu la fièvre. Guillaume est physiquement très mal, Caroline est dans un état comateux et ne se sent pas très bien, je ne sais plus quoi faire pour soulager Guillaume et mes coups de soleil me brulent atrocement, le moral est au plus bas ce soir…

Satonda island
Satonda island
Coucher de soleil
Coucher de soleil

> JOUR 3

La première chose que je vois en me réveillant c’est que Guillaume n’est plus à côté de moi. Très inquiète, je traverse le bateau à sa recherche. Il est finalement à l’arrière, au bord de l’eau. Il a été très malade toute la nuit et ne veut donc plus s’éloigner des toilettes. Cela me fait peur de le voir comme ça, il est livide, décharné (il a perdu 6kg en quelques jours…), et moralement il est au fond du trou. On décide qu’il va s’installer sur l’espèce de table/banc que les cuisiniers utilisent pour préparer les repas, et qui se trouve proche des toilettes, et à l’écart du groupe et donc du bruit. On lui pose un matelas, et on explique aux cuistots que dorénavant il ne mangera plus que du riz blanc, rien d’autre. Je lui fais une solution de réhydratation avec du sel et du sucre qu’il refusera de boire. Toute la journée je viendrai régulièrement lui réhumidifier le linge qu’il garde sur la tête pour le soulager.

Le premier arrêt se fait à Gili Laba, où on peut monter sur une grande colline pour avoir un super point de vue sur l’archipel aux alentours. On est tous bien affecté moralement par la situation et la motivation n’est pas là. Caroline et moi restons donc sur le bateau avec Guillaume qui profite du calme pour se reposer un peu, très fatigué de sa dernière nuit où il n’a pas dormi.

Le deuxième arrêt est un de ceux qu’on attend le plus, puisqu’il s’agit de Manta Point, un endroit où l’on peut observer des raies Manta en snorkeling. A peine arrivé, avant même de descendre du bateau, le guide nous montre des remous à la surface, plusieurs Manta sont juste là !

On saute à l’eau, mais les conditions sont difficiles, la mer est froide à cet endroit-là, il y a beaucoup de courant, et on découvre que les Manta ne sont pas la seule spécialité locale : il y a des tonnes de méduses ! On prend piqure sur piqure, impossible de les éviter. Malgré tout ça, le spectacle est magnifique, les Manta sont partout. Elles passent et repassent devant nous, parfois si proches qu’on a l’impression de pouvoir les toucher. Caroline remonte dans le bateau assez rapidement à cause du courant vraiment important. Malheureusement l’équipage ne fournit pas de palmes. J’ai ma propre paire et donc c’est plus aisé de gérer le courant, même si je reste vigilante. Je continue à profiter du ballet magnifique offert par ces poissons géants. En remontant sur le bateau, des plaques rouges apparaissent un peu partout sur nos corps, aux endroits où nous avons été piqué par des méduses. Heureusement ça ne restera pas longtemps.

Je suis triste que Guillaume n’ait pas pu assister à ce spectacle, je sais qu’il aurait adoré. Pour le moment il n’a pas vu de raie Manta puisqu’il n’était pas là à Nusa Lembongan quand nous avons plongé à la station de nettoyage. Nous espérons fort que cette chance se présentera à nouveau aux Philippines.

Nous rentrons dans le parc marin des Komodo. Réputé pour sa vie marine exceptionnelle, il l’est tout autant pour ses forts courants, et on le constate assez rapidement. En effet, l’eau est tellement claire que nous voyons le fond (pourtant à 15-20m) depuis le bateau, et nous remarquons qu’il ne défile pas vers l’arrière comme il le devrait si nous avancions, mais vers l’avant ! Malgré le moteur du bateau, nous sommes en train de reculer… Cela s’alterne avec des moments où nous avançons légèrement, et du coup nous stagnerons au même point pendant une bonne heure, malgré le moteur du bateau lancé à fond. Sur le moment nous sommes un peu inquiets de cette situation mais finalement le bateau arrive à dépasser l’endroit et nous repartons de plus belle.

Le 3ème arrêt de la journée se déroule sur la petite plage de Pink beach. A l’œil, la plage ne paraît pas beaucoup plus rose qu’une autre, mais quand on regarde de près le sable, on voit effectivement plein de petits points roses, qui sont dus à un espèce de corail local.

La plage est magnifique, en revanche il y a beaucoup de monde (oui on devient difficile…), et l’eau est à nouveau très froide. Guillaume reste encore une fois se reposer dans le bateau et nous partirons avec Caroline profiter un peu de l’endroit. La plage est vraiment sympa, et les fonds marins sont à nouveau magnifiques. Je me retrouverai à un moment dans un banc de seiches, sensations garanties !

La fin de journée se passe, et pour la nuit, bonne nouvelle : pas de navigation. Mes coups de soleil continuent à me faire souffrir mais la nuit sera malgré tout plus calme.

Pink beach
Invitation à la baignade
Pink beach
Le corail rose de pink beach
Pink beach
Coucher de soleil sur Komodo
Coucher de soleil sur Komodo

> JOUR 4

Guillaume est toujours bien malade, mais ce matin il n’a plus de fièvre et se sent un peu mieux, même s’il est toujours très faible. Aujourd’hui nous allons visiter les îles de Komodo et Rinca, toutes les deux connues car elles hébergent les fameux dragons de Komodo. Nous nous mettons d’accord avec Guillaume pour qu’il vienne visiter une de ces iles, mais pas les deux, il est encore trop faible, et en plus de ça il fait une chaleur de dingue, alors qu’il est à peine 6h du matin. Ayant entendu que Rinca est mieux que Komodo, nous décidons qu’il viendra pour celle-là, et restera donc se reposer en début de matinée pendant que nous irons à Komodo.

Avec le groupe, Caroline et moi partons donc visiter Komodo. Nous apercevons des dauphins depuis le ponton dans la baie. Nous retrouvons deux guides locaux qui nous accompagnent pendant la balade et nous protègent des dragons dont la morsure peut être mortelle, puisque leur bouche contient des toxines et de nombreuses bactéries, qui tuent les proies à petit feu en quelques jours. Pour nous protéger les guides possèdent une arme redoutable : un bâton avec une pointe en V… On a un peu de mal à comprendre comment cela peut protéger d’un varan qui peut mesurer jusqu’à 6m et faire des pointes de vitesse à 20km/h mais bon visiblement ça fonctionne. A peine sorti du camp, le premier dragon est là, allongé au soleil, nous ne l’avions au départ même pas vu ! La taille est effectivement impressionnante, mais il semble très placide. Nous continuons notre balade et croisons également toutes les proies des dragons : buffles, biches et cochons sauvages. Nous rencontrons un deuxième varan, encore plus grand que le premier, mais à nouveau complétement inactif. Nous en verrons encore d’autre près du camp, que les guides font bouger avec leur bâton pour amuser les touristes.

Lever de soleil Komodo
Lever de soleil à Komodo
Lever de soleil à Komodo
Arrivée à Komodo
Le premier dragon
Un cerf
2éme varan
Vue sur la baie
3ème varan
3ème varan
Cerf blessé

En repartant, nous verrons depuis le ponton deux requins nager au-dessus des coraux. Ce sont des requins à pointe noire, les même que celui que nous avons vu deux jours avant.

Nous naviguons au travers du parc marin de Komodo, et le site est vraiment très beau. Nous arrivons à notre deuxième arrêt : l’ile de Rinca. Cette fois ci, Guillaume nous accompagne pour le « trek » (3km….). C’est la première fois qu’il descend du bateau en 4 jours. En attendant le guide, il ne se sent déjà pas très bien. Nous commençons la balade, et à nouveau, de gros dragons sont à coté des habitations. Nous partons dans la forêt et rencontrons cette fois plusieurs femelles qui restent au dessus du nid pour protéger leurs œufs (mais qui n’hésiteront pas à manger les bébés juste après l’éclosion, une vision particulière de l’amour maternel ;) ). Pour se protéger, les bébés vivent dans les arbres les premières années de leur vie. On est très content de savoir ça, nous qui marchons justement sous des arbres ^_^. On croisera juste après un jeune varan. Plus peureux que les grands, nous arriverons quand même à l’approcher à une distance raisonnable. Si la première partie de la balade se fait en zone ombragée, la deuxième est en plein soleil, et la chaleur est harassante. C’est déjà pénible pour nous, ça l’est encore plus pour Guillaume qui se sentait déjà très mal sur la première partie. Marcher 3km sur du plat lui paraît le bout du monde alors que quelques jours avant il grimpait le Rinjani (dont les stats d’ascension font blémir), c’est dire son état physique. En repartant sur le bateau je manque de me faire attaquer par un singe avec lequel je me retrouve nez à nez faute de l’avoir vu avant. Il me montre ses dents et pousse des cris en s’avançant vers moi… Grosse frayeur à la clef. Je n’étais déjà pas bien rassurée en présence de singes, maintenant j’aurais la trouille à chaque fois qu’on en croisera.

Requin à pointe noire
Requin à pointe noire
Dragons de Komodo
Femelle dragon couvant ses oeufs
Bébé dragon
Femelle dragon couvant ses oeufs
Rinca
Rinca
Singe de Rinca

On repart, et après quelques heures de navigation on arrive finalement à Labuan Bajo, sur l’ile de Florès. Pour nous c’est la délivrance, on va enfin pouvoir descendre de ce bateau. C’est difficile à dire car nous avons aussi vu des choses magnifiques, mais ça ne compense pas l’angoisse de ces derniers jours.

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