Albanie

Publiée le 06/08/2019
De Gjirokaster a Shkoder 380 kms en passant par Vhrestas, Durres, Shengjin

Nous passons rapidememt la frontiere avec Goce a Cacavia.

Nous prenons la route de Gjirokaster qui se trouve a 50 kms.

La route est peu frequentee, en tres bon etat et toute plate.

Les villages, que nous trouvons tous les 3 a 4 kms, ne sont pas en immediate proximite de la route, eloignes d'environ 500 m. Dans un environnement aride ce sont des oasis de verdure amenages.

Fini les emballages plastiques tous les 5 mètres : cela change de la Grèce, de la Turquie, de la Sicile ...

La raison est simple : rien acheté, rien à jeter. Le jour où la consommation viendra on peut penser que les choses changeront (?).

Nous arrivons à Gjirokaster en fin d'après-midi ; j'ai réservé une chambre chez l'habitant dans une maison difficilement accessible. Chute au bas de la rue: je me retrouve sous le vélo, secouru par Goce et une passante anglophone sympa.

Nous arrivons chez nos hôtes, qui nous servent une boisson fraîche. Goce s'éclipse 5 mn avec le fils de la maison:  il a repéré quelques mètres plus bas un vendeur de pastèques, et revient aussitôt avec un "water melon" gigantesque dont il me découpe une tranche non moins gigantesque : il est aux petits soins avec moi car je ne suis pas bien remis de ma chute.

Les propriétaires me proposent, sans que je le leur demande, de partager ma chambre à 2 lits avec Goce, ce que j'accepte bien entendu.

Le logement est simple mais très propre. 

Petite douche et balade dans Gjirokaster: nous retirons des lékés (monnaie locale) chez un commerçant d'une quarantaine d'années qui nous raconte son histoire et l'histoire récente de Gjirokaster, qui est passée en 3 ans de 35 000 à 25 000 habitants, vidée de sa population partie en Europe de l'ouest tenter sa chance

Il nous raconte la corruption, la misère, les manifs à Tirana contre le régime, et son pessimisme pour l'avenir bien qu'il soit revenu d'un séjour de 7 ans à Thessalonique en Grèce.

Nous allons prendre une bière malgré tout dans le typique village, mi-albanais mi-grec.

Les gens s'expriment dans les 2 langues : le grec, langue maternelle pour la plupart d'entre eux, et l'albanais, langue officielle. Tous les panneaux de signalisation sont bilingues. Conséquence du découpage parfaitement réussi de l'ex empire ottoman après la 1ère guerre mondiale dans les Balkans

Je n'arrêterai pas de faire ce constat dans les semaines suivantes, tant en Albanie, au Monténégro, en Croatie.

Les albanais du Nord, qui ne parlent pas la langue officielle mais un dialecte à eux, traitent ceux du Sud de "bâtards" mais considèrent les kosovars, leurs voisins, comme des frères.

Tous autant qu'ils sont sont d'une gentillesse extrême: c'est la grande leçon que je tirerai de ce petit séjour de 10 jours.

Si j'avais pour l'instant à trouver le cocktail idéal je dirai: zen comme les crétois et généreux comme les albanais.

Il ne manque sans doute que le côté festif des Irlandais ou des Écossais que je demande à découvrir ou redécouvriir !

Le soir nos hôtes nous invitent à boire un verre avec eux.

Ils nous servent un verre de raki que nous buvons assis sur les escaliers extérieurs de la maison. Moment très agréable au cours duquel ils nous parlent de leurs vies pas très réjouissantes : elle travaille dans une banque et lui chez un fabricant de mobilier (il y en a pléthore ainsi que je vais m'en apercevoir par la suite). Je garde de cet instant le beau sourire triste de notre hôtesse.

Le lendemain départ à la fraîche : Goce et moi, après une journée passée ensemble, nous séparons après 30 kms: je pars en direction de Fier et Goce veut découvrir la montagne albanaise : il est fou, ce Goce.

Échange d'adresses et nous voilà repartis.

Petit arrêt dans un bistrot, à l'invitation du patron qui m'alpague au bord de la route. Lui et ses copains me parlent de football, de Zidane ... et de Brest qui vient de monter en Ligue 1, et il m'offre un super café: que de rencontres émouvantes.

Je longe un fleuve de toute beauté, le Vjosé, qui prend sa source en Grèce et irrigue l'Albanie sur près de 200 kms jusqu'à se jeter dans l'Adriatique à Vloré, là où va Goce: eau carrément bleue en permanence.

J'arrive en fin d'après-midi dans un petit village nommé Vhrestas dans lequel j'ai réservé sur booking.com une maison entière pour 15 € la nuit.

Impossible de trouver la maison. Je demande à une personne au bord de la route si ça lui parle. Il percute au bout de quelques minutes que c'est la maison de son neveu, qui habite Tirana à 120 kms de là : le neveu confirme au téléphone mais confirme aussi que la maison n'est pas prête.

Il donne les consignes à Avdulaj, l'oncle, qui fait fissa, trouve les clés, des draps ...et me conduit à ma maison jaune. Effectivement il y a du boulot, mais je lui fais comprendre que ce n'est pas bien grave : une douche suffira, car il a fait chaud. Manque de bol, la douche ne marche pas: pas d'eau chaude, pas de pommeau de douche ; Avdulaj s'improvise plombier et m'annonce tout fier une heure plus tard que tout marche. Merci Avdulaj !

Après la douche le réconfort : Avdulaj tient en fait la station-service qui appartient au neveu ; la station-service qui délivre de l'essence au compte-gouttes dans des bidons que chacun apporte, fait aussi bistrot (je découvre que chacun fait plus ou moins bistrot) et Avdulaj me sert une bière Elbar (la meilleure) puis un raki. Rien n'est trop beau pour me faire plaisir. Quelle générosité.

Les propriétaires arrivent en provenance de Tirana pour voir si tout se passe bien. Je suis leur 1er locataire !!! Re-bière, visite dans le jardin pour ramasser des peu es bien mûres, télécommande pour la clim. Incroyable.

Avant la nuit je vais faire un tour dans le village situé à 2 kms, et là je tombe dans une vraie tornade: tout vole, les tables, les chaises, les enfants sont projetés par terre. Cela dure 1/2 h; je saurai le lendemain par les infos françaises qu'il y a eu 6 morts.

Au retour plus d'électricité bien entendu.

Cela ne m'empêche pas de passer une bonne nuit, et de retrouver Avdulaj au petit matin. Quelques échanges par Google Translate, l'adresse Facebook (Fesbuk: DASHNOR AVDULAJ) et nous nous quittons avec beaucoup d'émotion.

Je prends la route de Durres, ville portuaire de 120 000 habitants à 70-80 kms de Tirana.

J'y arrive assez péniblement car je suis fatigué et que l'état de la route est moyen pour les cyclistes, qui peuvent difficilement emprunter la bande latérale sur laquelle toutes les plaques d'égout ont été enlevées pour être revendues chez le Guyot local.

Station balnéaire depuis l'époque communiste, Durres en a gardé le côté populaire : tourisme de masse, vacanciers sans complexes, plages bondées et bruyantes : très attachant et authentique.

Il ne faut cependant pas faire 100 m pour découvrir l'envers du décor : immeubles délabrés, plaques d'égout enlevées ...

J'y passe cependant une journée bien agréable et repars pour Shengjin, dernière étape avant Shkoder.

1ère crevaison à 20 kms de Durres après plus de 6 000 kms.

Je répare rapidement (je n'ai pas trop perdu la main).

Je m'arrête à la station-service suivante pour me laver les mains, tout près d'un groupe électrogène SDMO.

Vraiment rien de particulièrement intéressant en cette journée.

Le long de la route les stations de lavage de voitures bricolées, des hôtels très kitch (ils adorent), des installations faites ingénieusement avec les moyens du bord : la vie quotidienne.

Le soir petit kebab à Shengjin: mon vélo fait l'objet de petites attentions compte tenu de ses aménagements. Je fais un peu nanti !

Le lendemain matin départ pour Shkoder où j'ai rendez-vous avec la famille Doniku dont une partie est brestoise depuis quelques mois (Artan, sa femme et ses 3 enfants), ce qui me vaut d'être reçu royalement pendant 2 jours.

J'y apprends le mode de vie de cette région, la nourriture, l'histoire ...

Le père, qui a 76 ans, a été éduqué dans une école russe dans les années 60, parle serbe.

Le beau-frère de Artan est pêcheur de carpes en lac et rivières, et approvisionne les restaurants tous les jours avant midi.

J'y vois aussi la position soumise de la femme, ni plus ni moins enviable probablement que dans les autres pays des Balkans.

Je vois la fascination pour la voiture, en particulier pour les grosses cylindrées allemandes (ils ont à peu près tous une Mercedes plus ou moins âgée).

Je vois la vénération pour les personnages historiques de légende, qui ont tous droit à leur statue.

Je vois leur amour du kitch.

Je vois l'importance de WhatsApp, Viber ... pour le maintien du lien avec la diaspora.

Flotte néanmoins un air de résignation et de désespérance.

Je me sens encore le nanti de service, pas très à l'aise.

Merci encore à toute la famille Doniku pour son accueil hors normes.

Je reviendrai.






1 commentaire

marylippe

Encore Bravo pour avoir réussi à éviter toutes ces "plaques" d'égout !!!
Que de belles rencontres...Super !
Bon courage pour la suite.
Phil

  • il y a 5 ans