La Baïne

Publiée le 25/12/2017
Savoir flotter

Pris dans une baïne. Respirer fort, regarder le ciel. Faire le vide. Lutter c'est se noyer. Se laisser porter à la dérive. Loin de ce que l'on connait. Sans jamais savoir si l'on pourra y revenir. Se laisser porter vers l'inconnu et le vertige du vide. Et savoir que jamais l'on ne pourra voir la plage que l'on a quittée avec les mêmes yeux, Avec la même foi, avec le même jugement.

Le temps. Qui s'empare du ciel et de l'esprit. Le temps. Ami que l'on croyait si bien connaître qui doucement et tendrement se délie et perd sa consistance, Le temps n'a jamais été si proche, si réel, si familier et pourtant, c'est à cet instant précis que l'on ne pourrait lui peindre un visage. Un ami inconnu qui nous prend dans la baïne et qui nous fait flotter. Flotter. Flotter pour ne pas se noyer. Le temps sans visage nous fait oublier. Il nous fait oublier ce que l'on sait. Alors on essaye de se raccrocher. Parce que l'identité ne tient qu'à un fil pas vrai ? Et ce fil ? C'est quoi ce fil merde !? C'est ce que l'on sait. C'est le savoir pas vrai ? C'est ce qui est évident et que l'on ne peut pas remettre en question. Accroche toi Léo. Accroche toi à ce que tu sais. 

Mais le vertige prend. Le ventre se noue, La gorge se sèche. On essaye de survivre de s'accrocher à la vérité. C'est sûr ça nous sauvera. C'est certain. Parce que ... parce que ... parce que quoi ?

Blanc.

Comme un requin au fond de l'océan, la panique surgit et rode autour. L'angoisse. L'angoisse... La panique guette. Elle est là. Et l'eau devient petit à petit glacée. Mais au milieu de l'océan, emporté par des courants vers l'inconnu, lorsque la plage n'est plus qu'un point à l'horizon, Léo sait que s'il panique alors ... Alors il se noie. 

La respiration est fébrile. Ne pas paniquer, Ne pas lutter. Et pourtant, tout s'écroule. Seul face à soi même tout ce que l'on sait s'écroule. Plus rien n'a de valeur. Le Doute surgit. 


Le Doute. 


Léo emporté par la baïne du voyage a fait sa rencontre. Léo a fait la rencontre du Doute de son maître à penser : Le Doute Cartésien. 

Sans crier gare le courant devient de plus en plus fort. Il faut flotter. Flotter. Car les question telles des courants marins impitoyables abondent et nourrissent la baïne. Ne pas paniquer. Et accepter le Doute. 


C'est beau. Beau de voir Léo dans cette baïne. Beau de le voir danser dans le courant avec le Doute. Beau de sentir l'écume de ses jours s'animer et fusionner avec le courant pour l’emmener toujours plus loin. Toujours plus loin de l'évidence. Toujours plus loin de la plage. Toujours plus loin dans le Doute. 


La beauté d'un homme qui vu du ciel flotte sur l'océan. La beauté d'un sourire. La beauté des yeux qui voient le bleu du ciel d'une autre couleur. Un bleu qu'il n'avait jamais pris le temps de regarder. Un bleu qu'il n'avait jamais pris le temps de remettre en question. 


Alors il sait qu'à l'image de ce bleu ciel, il est temps pour lui d'accepter de douter et de regarder la couleur de son for intérieur. Car non son for intérieur n'est pas vide. Ni noir. Ni sombre. Il est d'une couleur chatoyante qu'il faut regarder longtemps pour saisir. D'une couleur belle. Et un jour alors il pourra donner un nom à cette couleur. Et ce n'est qu'en saisissant la couleur de son for intérieur que le doute le quittera et qu'il saura : il saura juger. Il saura que le savoir n'est rien sinon le jugement du monde à travers sa couleur. 


Alors, il viendra colorer avec cette couleur qui lui sera propre. Et reviendra à ce dont il n'a jamais pu douter : l'amour de ses proches. L'amour pour ses proches. 


L'année de ses 23 ans sera l'année de la baïne. Et mon regard tendre et complice coule sur lui.

Ce voyage sera sa baïne. 

Et je l'imagine déjà à son retour annoncer sa couleur. 


Signé son ami 

Julian.

Allez plonge !

Lever l'encre

Passer son anniversaire loin de tout est une des sensations déroutantes de ce voyage. Le tourbillon de la vie est parfois intimidant mais plus on lutte contre et plus il nous écrase... Alors autant lâcher prise.

Flottant dans les courant de mes pensées il est parfois bon d'avoir un ami, une bouée ,sur laquelle s'appuyer. Certes la sensation de solitude n'est pas totale mais cela permet de prendre la température de l'eau. Quand Julian décollera, un nouveau voyage commencera et un flot de sentiments contradictoires viendront accompagner son départ. Triste et anxieux, heureux et impatient. Je garderai les débats, souvent non convenus, que nous avons menés comme base. Ces réflexions qui font de cette aventure plus qu'une simple visite.


C'est en se laissant porter que l'horizon s’éclaircit. Guatape a été le moment parfait pour contempler le calme du lac. Une surprise à la hauteur de l'événement.

Les effluves d'un repas gastronomique, l'accordage d'une guitare, le reflet des flammes dans l'onde plate du lac. Nous arrivons à l'auberge avec l'impression que quelqu'un a planifié la soirée parfaite pour entamer ma 24ème année. Mais cette fois-ci, ni la malice de Julian ou la bienveillance de ma sœur ne sont à l’origine de cette surprise. Les vents sont favorables et ils soufflent dans mon dos me poussant en avant. 

La soirée se terminera au lever du soleil, la voix cassée et les doigts usés par les cordes encore vibrantes. Les braises réchauffent les pierres et les dernières histoires viennent sceller mes paupières. Le bonheur est simple et sincère.

Lac de Los Penol
La ville de Guatape
Le repas de Noël
6 commentaires

Vv

Joyeux Noël Leo . Merci pour ces belles pages . C est un beau cadeau ! Bisous
Véro de la rue d Aquitaine

  • il y a 6 ans

kati

Merci Julian pour cette page si bien écrite!!. Cette baïne est tour à tour effrayante et aussi pleine de promesses si on parvient à lui faire confiance et à se laisser porter,… car elle ramène toujours au rivage. C’est une métaphore pleine de justesse… Vous vous connaissez bien… C’est remarquable et rassurant… et comme les mots me manquent je vais encore citer une personnalité pleine de sagesse… Saint Exupéry dans le Petit Prince a dit au sujet des étoiles…« Les gens ont des étoiles qui ne sont pas les mêmes. Pour les uns, qui voyagent, les étoiles sont des guides. Pour d'autres elles ne sont rien que de petites lumières. Pour d'autres, qui sont savants, elles sont des problèmes. ». Que votre étoile ne soit plus un problème à résoudre mais un guide bienveillant et protecteur... Bises à vous 2

  • il y a 6 ans

Domie

Vos mots se lisent comme un roman, tour à tour historique, géographique, gustatif, odoriférant et introspectif...
A vos plumes, pour régaler mes yeux et mes papilles.
Bises

  • il y a 6 ans

EmmaM

Julian tu me fous la "pétoche" moi qui ne sais pas flotter.... mais il ne s'agit pas de moi de Léo , ce petit fils doué dans tous les domaines , mais toujours bien entouré !
en plus je ne suis pas sûre d'avoir tout compris.Julian , bon vent et à bientôt pour une nouvelle étape avec Léo. Bises à vous deux

  • il y a 6 ans

RaymondR

Il est bon parfois de ne pas prendre les chemins empruntés par tout le monde. Encore faut-il le faire avec " sagesse "et pour ça nous te faisons confiance.
Profitez bien des folles soirées à venir.
Bisous
papy / mamie

  • il y a 6 ans
Léo

Leo

Merci à tous pour vos retours ! Pour le moment je flotte plutôt pas mal ! Je vais me servir de la baine pour aller faire un peu de surf et de plongé haha !
Bises

  • il y a 6 ans
1 Voyage | 45 Étapes
Guatapé - Antioquia, Colombie
17e jour (22/12/2017)
Liste des étapes

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