Labrador, Terre-Neuve-et-Labrador

Publiée le 07/12/2017
Mon tour du Canada atlantique n'aurait pas été complet sans un passage par le Labrador.

Ma visite de Terre-Neuve achevée, j'ai maintenant pour objectif de partir à la découverte de l'ouest du pays. Pour retourner au Québec depuis le parc national du Gros-Morne, j'ai deux solutions :

  1. Solution la plus évidente : prendre un ferry à Channel-Port-aux-Basques en direction du Cap-Breton, et refaire le trajet inverse de celui effectué ces deux derniers mois. Distance : +/- 1 930 kilomètres.
  2. Solution la moins évidente : traverser le Labrador. Distance : +/- 2 590 kilomètres.

De ce que j'en sais du Labrador, à ce moment-là, c'est qu'il n'y a rien à y faire et que je vais devoir faire du stop sur des routes gravillonnées interminables. Et si je reste bloqué au milieu de nul part ? Combien de temps ça va me prendre cette affaire ?

Malgré tout, je suis ici pour découvrir un maximum de choses et d'endroits, et non pour parcourir deux fois les mêmes routes, Le choix est donc vite vu : je vais « rentrer » par le Labrador. Advienne que pourra. Ne sachant absolument pas dans quoi je m'embarque, je me donne initialement une semaine pour effectuer la traversée de la région.

Labrador

Le Labrador est la région continentale de la province canadienne de Terre-Neuve-et-Labrador. Cependant, un conflit frontalier subsiste avec le Québec.

Le Labrador est séparé de l'île de Terre-Neuve par le détroit de Belle-Isle. La région fait partie de la péninsule du Labrador […].

Le Labrador a une population de 27 860 habitants (2001) dont 30 % est d'origine autochtone (Inuit, Innu et Métis), répandue sur une surface de 294 330 km2 aussi grande que l'Italie ou la Nouvelle-Zélande. On trouve une petite communauté francophone d'origine québécoise et acadienne, venue dans les années 1960 pour travailler dans l'exploitation minière.

Source : Wikipédia

Après ma dernière randonnée dans le parc du Gros-Morne, je reprends immédiatement la route. Objectif : atteindre le port de Sainte-Barbe, tout au nord-ouest de l'île de Terre-Neuve, avant la fin de journée, afin d'embarquer sur le dernier des trois ferries effectuant la traversée ce jour-là. Assez rapidement, la chance me sourit : une automobiliste en provenance de St. John's et à destination de la pointe nord de l'île m'embarque. Parfait ! Pour l'anecdote, cette jeune étudiante a tout de même loué une voiture, conduit, seule, plus de 1000 kilomètres dans sa journée, voulant absolument voir les vestiges viking avant d'être trop occupée par ses cours. Elle prévoyait un retour le lendemain. Les canadiens n'ont définitivement pas la même notion des distances que nous autres Français !

Signe tout pourri…

Arrivé à temps à Sainte-Barbe, je m'acquitte des 11,75 CAD pour l'achat d'un billet de bateau en direction… du Québec ! Temps de traversée : environ 1h45.

Jean-Michel Traversier me fait signe de suivre ce gros camion !

C'est à ce moment-là que commence le jeu du réglage de la montre ! Débarqué à Blanc-Sablon, village québécois situé à la frontière avec le Labrador, je remonte une première fois les aiguilles d'une heure et demie, pour être à l'heure de l'est. Après être revenu à Terre-Neuve et Labrador, deux kilomètres à l'est, j'avance de nouveau d'une heure et demie, pour revenir à l'heure de Terre-Neuve. Enfin, après un peu plus de quatre heures de route vers le nord, nouveau changement : passage à l'heure de l'Atlantique, je recule une nouvelle fois ma montre d'une heure. Bref, les fuseaux horaires dans la région, c'est un peu le bordel ! Et pour cause, l'heure de l'île s'applique également sur une petite partie sud du Labrador…

Le village de Forteau

Une autre chose à prendre en compte en débarquant au Labrador: les mouches ! David, rencontré à Terre-Neuve, m'avais d'ailleurs prévenu et, malgré ma réticence, avait insisté pour me laisser sa moustiquaire pour tête. Gentiment posté sur le bord de la route, le pouce en l'air, je n'ai guère mis longtemps à comprendre ce qu'il m'avait évoqué : des centaines de petites mouches qui s'agglutinent autour de toi, venant frôler inexorablement ton visage, tes oreilles. Une sensation forte désagréable, qui m'a rapidement fait dégainer le filet !

Mode apiculteur activé

Ma destination du jour sera Happy Valley-Goose Bay, petite ville d'environ 8 000 habitants située à 620 kilomètres au nord de Blanc-Sablon. Petite, mais néanmoins ville principale de cette partie continentale de la province.

Happy Valley-Goose Bay

La cité d'Happy Valley-Goose Bay est issue du regroupement de la ville d'Happy Valley et du district de Goose Bay, où se situe une base militaire. Cette dernière a perdu en ampleur ces dernières années. Terrain d'entrainement de l'OTAN, elle accueillait jadis de nombreux militaires étasuniens, allemands, anglais et italiens (entre autres). Aujourd'hui, les infrastructures restantes sont principalement exploitées par l'armée canadienne.

Rien d'autre que sa position géographique n'a réellement motivé ma volonté d'y faire halte. En effet, il faut savoir qu'au Labrador, les villes et villages sont très isolés. Alors que sur les 200 premiers kilomètres, j'ai traversé une petite dizaine de localités, la suite n'est qu'une longue route gravillonnée, exempte de toute station-service, de tout réseau téléphonique. Expérience assez intéressante que de voyager sur cette route 510 interminable, où il ne se passe quasiment rien pendant plusieurs heures.

Direction Happy Valley-Goose Bay
Route 510
Route en voie d'être goudronnée

Alors que je misais principalement sur les camions pour traverser la région, c'est finalement confortablement installé dans un bon gros pick-up que j'ai effectué la majeure partie de ce trajet. En connaisseur, le chauffeur avait même légèrement dégonflé ses pneus, afin d'améliorer l'adhérence du véhicule.

Ford F250 Lariat Super Duty

Arrivé à destination en fin d'après-midi, je découvre une ville sans grand charme, sans intérêt touristique. J'y ai tout de même passé deux jours, histoire de… ne rien faire ! Un peu de repos, au milieu de nul part, ne m'a pas fait de mal.

Anciens baraquements allemands sur la base militaire
Panneau traduit en langues autochtones

Au moment de reprendre la route, deux jours plus tard, mon nouvel objectif est de parcourir les 530 kilomètres qui me séparent de Labrador City, deuxième ville la plus peuplée du Labrador. Entre les deux, une seule et unique localité, qui n'a lieu d'être que par la présence d'une centrale électrique : Churchill Falls.

Direction Labrador City

Après trois lifts avec des automobilistes, je me retrouve au milieu de nul part, sur une route où aucun camion ne pourra et ne voudra s'arrêter. Grosse erreur de ma part. C'est alors que je devine au loin ce qui semble être la cabine d'un poids lourd stationné. Me voilà lancé dans un sprint de plus d'un kilomètre, sacs à dos sur les épaules, pour essayer de l'atteindre avant qu'il ne reparte. Je tombe alors sur un chauffeur québécois, qui retourne à Baie-Comeau, 1 100 kilomètres plus loin, là-même où j'ai prévu de m'attarder le lendemain. Malgré les consignes de sa compagnie, il accepte de m'embarquer, à ma plus grande joie. Cela valait bien un sprint !

Avant de l'atteindre, il fallait que j'immortalise ce moment !

Je ne m'arrêterai donc pas à Labrador City. Me voilà parti pour plus de 24 heures de route, avec le même chauffeur, sur les routes désertes du Labrador. Par ailleurs, contrairement à la route 510, la route 500 que j'emprunte ce jour-là dispose d'un revêtement sur sa quasi-totalité. Mais lorsqu'il n'y en a pas, c'est sur une piste couverte d'ornières que nous circulons.

Trans-Labrador Highway (Route 500)
Trans-Labrador Highway (Route 500)
Nous sommes suivis !

Après une courte et froide nuit passée en tente entre les camions, dans un relais routier, nous atteignons la rivière Manicouagan, ponctuée par quatre barrages hydroélectriques, dont le plus important et le plus connu est Manic-5. Ce dernier est d'ailleurs visitable en été.

Nuit entre les camions
Descente au pied de Manic-5

Fait intéressant : l'édification de cet obstacle a donné naissance à l'un des plus grands réservoirs au monde.

Réservoir Manicouagan

Le réservoir Manicouagan, aussi appelé lac Manicouagan, est un cratère météoritique qui a été inondé par l'édification du barrage Daniel-Johnson sur la rivière Manicouagan. […] Le réservoir, d'une superficie de 2 000 km2 et d'une profondeur moyenne de 73 mètres, est un des plus gros réservoirs du monde en volume et en profondeur. Il alimente les centrales hydroélectriques de Manic-5 et Manic 5-PA.

L'Île René-Levasseur, au centre, est née lors du remplissage du réservoir et l'ensemble, île plus réservoir, est parfois appelé l'« œil du Québec ».

Source : Wikipédia

L'auto-stop au Labrador

Le Labrador est un territoire assez spécifique pour faire de l'auto-stop, de par les longues distances séparant chaque ville. L'idéal est clairement de miser sur les camions. Bien que la grande majorité n'ait théoriquement pas le droit d'embarquer des auto-stoppeurs, faire preuve de persévérance et essayer d'engager des discussions permet souvent de trouver le bon lift.

Poucomètre : 13 102 kilomètres.

Conclusion

Bien que longue et parfois monotone, j'ai énormément apprécié l'expérience de la traversée du Labrador. Qui plus est, avoir eu la chance de l'effectuer en grande partie avec un routier l'a rendu encore plus inoubliable. Alors que j'imaginais mettre environ une semaine pour la compléter, trois jours et demi m'auront finalement suffit (deux jours et demi de route + une journée de repos). De quoi me laisser plus de temps pour les visites à venir !

À noter enfin que j'avais un temps songé à rendre ce passage par le Labrador encore plus inoubliable en effectuant la visite de quelques villages de pêcheurs isolés le long de la côte Atlantique. Malheureusement, cela était logistiquement trop compliqué, car ceux-ci ne sont accessibles que par bateau, et aurait été trop coûteux.

« Délaisse les grandes routes, prends les sentiers. »

– Pythagore

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1 Voyage | 108 Étapes
Happy Valley-Goose Bay, NL, Canada
230e jour (04/09/2017)
Étape du voyage
Début du voyage : 18/01/2017
Liste des étapes

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