Bastia

Publiée le 18/09/2025
Petite entrevue dans la cité des gouverneurs aussi appelée la capitale du Nord, la plus grande rivale d'Ajaccio, j'ai nommé Bastia la magnifique., plus grande ville de Haute Corse.

Bastia, véritable capitale religieuse hétéroclite

Bastia trouve son origine dans le village de Cardo et surtout sa marine, Porto-Cardo. Les villages du Cap Corse, généralement posés sur les hauteurs pour se protéger des invasions, bénéficiaient d’une ouverture littorale leur permettant de pêcher et de commercer. Au XIVᵉ siècle, les Génois, maîtres de la Corse, trouvèrent que l’anse de Porto-Cardo avait un fort potentiel stratégique pour échanger directement avec Gênes de l’autre côté de la mer. Ils y bâtissent dès lors une forteresse, la «bastiglia», en 1380, pour protéger cette anse. Puis vinrent les remparts en 1480, et le palais des Gouverneurs en 1530. Devenue résidence du gouverneur génois et de ces conseillers, la citadelle se développe au point qu’une ville s’érige autour d’elle : Bastia, qui finit par devenir la capitale génoise et donc capitale de la corse pendant un temps. Son expansion fut telle que le village de Cardo fut annexé pacifiquement en 1844 et devint un quartier à part entière de la ville.

Au XIXᵉ siècle, la ville s’agrandit autour de ses deux quartiers historiques : Terra Nova, la citadelle et Terra Vecchia, le vieux port, qui restent le cœur et l’âme de la cité. Ces quartiers sont intrinsèquement liés, et pourtant, tout les oppose : traditionnellement, Terra Vecchia était l’emplacement des pêcheurs et de leurs familles, des gens modestes à l’exception de quelques armateurs et capitaines, alors que Terra Nova, les hauts faubourgs de la ville, était réservé à une élite génoise. C’était alors les Génois en haut et les Corses en bas, les nobles au-dessus et les roturiers en dessous.

Son patrimoine est riche : la citadelle, aux ruelles pittoresques, abrite l’église Sainte-Marie, la chapelle Sainte-Croix avec son « Christ noir » miraculeux, et l’ancien palais des Gouverneurs transformé en musée d’Art et d’Histoire. De là, jardins et escaliers offrent des vues remarquables sur la ville.

Le Vieux-Port, berceau de Bastia, a perdu son rôle économique mais séduit par son ambiance animée, ses terrasses en bord de mer et son église Saint-Jean-Baptiste, joyau baroque du XVIIᵉ siècle.

Un des grands atouts de Bastia réside dans son patrimoine religieux, d’une richesse exceptionnelle. La ville abrite en effet un nombre impressionnant d’édifices, avec plus de 15 églises répertoriées sur son territoire ! C'est sans doute la ville de corse avec le plus d'églises !

Vue de Bastia et du vieux port
Vue du vieux port
Vue de l'accès au jardin de la citadelle

Les jardins de la citadelle, passerelle entre deux monde

La création du premier jardin public de Bastia renvoie à une problématique récurrente dans l’histoire de la ville, relier la ville haute Terra Nova et le port Terra Vecchia. La destruction, en 1748, de l’oratoire Saint-Charles par le pouvoir génois permet la création d’un large chemin vers le port. En 1819, il est terrassé en un espace de promenade appelé la ricciata.

Vue du palais des gouverneurs
Vue du palais des gouverneurs.2
Vue du palais des gouverneurs.3

Le pavillon des nobles Douze / pavillon d'entrée

Construit à partir de 1703 à l'emplacement de boutiques, le pavillon des Nobles Douze que l'on nomme palais des gouverneurs était la résidence des représentants du ''Deçà des monts'', c'est à dire la partie nord de la corse, élus délégués auprès du gouverneur génois. On élisait ainsi tous les ans douze représentants qui se succédaient, tour à tour en occupant leur poste pendant un mois. Le Noble Douze du mois accompagnait le gouverneur dans ses déplacements et le conseillait dans tous les domaines. Il était en outre chargé de veiller à l'entretien et à la sécurité des routes et chemins. Il exerçait un pouvoir de décision lors de procès et d'affaires graves. 

Ce bâtiment est accolé au pavillon de l'entrée, une fondation plus ancienne qui abritait le corps de garde des soldats génois et dont l'étage servait d'appartement à l'officier principal. 

Il est doté d'une prison située dans les sous-sols. Au début du XVIIe siècle elle était composée de 14 cellules. Chacune portait un nom : la Reale, la Lomellinail Turcoil Portonela Roverail Fornola Volpe, etc. Une cellule était réservée aux femmes, il Panno.

En 1812, 300 prêtres romains sont emprisonnés pour avoir refusé de prêter serment exigé par Napoléon 1er. L'un d'eux nous a laissé une description remplie d'effroi. Il évoque les conditions d'incarcération, la puanteur, les insectes, les écoulements d'eau de la citerne. Il compare les cinq dernières cellules avec l'antichambre de l'enfer, car située au-dessous du niveau de la mer. Quant à la cellule appelée l'Inferno, c'est une pièce où la mer pénètre et où l'on ne voit la lumière que par un soupirail.

Vue de l'église saint Jean-Baptiste
Vue de l'église saint Jean-Baptiste (intérieur)
Vue de l'église saint Jean-Baptiste (intérieur).2
Vue de l'église saint Jean-Baptiste (intérieur).3
Vue de l’église saint Jean Baptiste (intérieur).4

La plus grande église de Corse

L'église Saint-Jean-Baptiste, la plus vaste de Corse, a été construite entre 1636 et 1666. Les campaniles de la façade furent ajoutés tardivement au XIXe siècle. L’intérieur du sanctuaire est orné de nombreuses œuvres d’art dont on retiendra le tabernacle en argent du maître-autel. On remarquera également, au-dessus de la statue de marbre de Saint Jean Baptiste, un surprenant groupe de stuc représentant la Circoncision du Christ. L’imposante tribune d’orgue en « nid d’hirondelle », datée de 1742, est ornée de trois tableaux représentant des scènes de la vie de Saint Jean Baptiste.

Fait historique, cette église a été financée de manière volontaire en grande partie par le peuple Bastiais lui même, le quartier du marché sur le flan droit de l'église, en retrait par rapport à cette dernière, abritait traditionnellement les familles de pêcheurs du village qui avec le temps, ont finit par réunir les fonds suffisants nécessaire à l'édiction de cette église.

Oratoire de l'immaculée conception (intérieur)
Oratoire de l'immaculée conception (intérieur).2
Oratoire de l'immaculée conception (intérieur).3

L'Oratoire de l'immaculée conception

Je n'ai pas de photo de l'extérieur de l'oratoire, la façade est très simple. Seul un enduit couleur blanc crème, voir beige recouvre l’appareillage du mur dont les biques de pierres sont disposées en motif ''pose debout''. La porte centrale est encadrée de marbre fin et surmontée d’un oculus permettant d’éclairer la nef. Un riche portail sculpté en marbre de style  baroque orne la partie supérieure du portail, il combine courbes et contre  courbes mêlant  volutes,  coquilles,  cartouches,  guirlandes qui viennent en opposition aux lignes droites des piedroits, linteau et entablements moulurés. Un grand cartouche baroque porte la date de 1704 et une inscription évoque la Vierge de l’Immaculée Conception dont une figuration en bas-relief prend place dans un édicule, le sommet de l'édifice est typique du style néoclassique, c'est à dire un fronton triangulaire surmonté d'une croix de marbre.

L’apposition des blocs de marbre renvoie à un style néoclassique, tandis que les guirlandes de feuillages, festonnées de part et d’autre de monumentales têtes d’angelots, sont inspirées de la Renaissance italienne.

En pénétrant dans l’édifice religieux, les superbes damas sautent aux yeux, du vermillon au bordeaux, qui recouvrent les murs et par les velours de Gênes qui revêtent les pilastres. Cette ambiance feutrée et luxueuse est due à la volonté de la République de Gênes d’encourager l’industrie textile. Certaines étoffes ont des dessins chargés tandis que d’autres sont plus simples.

Tout est magnifique, les stucs dorésl'enduit intérieur, les pilastres cannelés, les chapiteaux corinthiens, le médaillon central et les moulures qui ornent la voûte, les corniches, les frises et architraves.

Au plafond, il est possible de voir que les peintures de la voûte regorgent d’élégance, de variété et la profondeur de la composition en font un exemple des plus remarquables de la ville de Bastia. Parmi les décors les plus anciens, il faut retenir celui du médaillon central peint en 1618, dont les grands personnages incarnant les prophètes de l’Ancien Testament qui se trouvent de part et d’autre de la nef.

On ne peut échapper à la présence des lustres installés au plafond : deux grands lustres de 12 branches éclairent le chœur et six petits de 6 branches éclairent la nef, tandis que des lampes de sanctuaire ornent les murs, ce sont enfaite des lampes à huile en tôle d’argent.

Anecdote médicale : L'idole du christ dans cette église était si ressemblante à un corps humain, qu'elle fût utilisée jusqu'au XVIIIe siècle par les apprentis médecins pour s'exercer aux travaux pratiques sur le corps de l'Homme.

Catedrale Santa Maria Assunta
Catedrale Santa Maria Assunta (intérieur)
Catedrale Santa Maria Assunta (intérieur).2

L'église Sainte Marie, ancienne cathédrale de Bastia

Pendant longtemps, la cathédrale Sainte Marie de Bastia fût considérée comme la cathédrale la plus prestigieuse de l'île de beauté, en effet, de 1570 à 1802, elle accueillait en son sein le diocèse de Mariana et Accia qui été le plus influent de l'île en raison notamment de la forte histoire passée de Bastia en tant que capitale Génoise, c'est dans cette cathédrale que s'effectuait la passation de pouvoirs entre le gouverneur sortant et le nouveau. Le premier présentait à son successeur les clefs et le sceptre du Royaume de Corse, posés sur un plateau d'argent. Dans le chœur deux trônes se faisaient face : d'un côté siégeait l'évêque, de l'autre le gouverneur. Rappelant la dualité de deux grands pouvoirs de l'époque dans la célèbre maxime ''Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu'' car dans la société de l'époque, le pouvoir des puissants ne pouvaient s'ingérer arbitrairement dans les affaires religieuse du peuple qui devait rendre des comptes à l'église indépendamment du roi, voilà pourquoi deux trônes dans cette cathédrale formaient la face d'une seule et même pièce, le pouvoir aliénant les hommes. auquel ils doivent se soumettre, le clergé et la royauté.

Cependant en 1801 après la nomination de Napoléon en tant que premier consul de France, ce dernier eut la volonté de faire d'Ajaccio la véritable capitale de corse, que ce soit d'un point de vue administratif comme religieux, il va donc supprimer le diocèse Mariana et Accia pour ne laisser que celui d'Ajaccio qui couvre depuis lors toute la corse, la cathédrale est donc rétrograder en simple église et mise sous la tutelle du diocèse d'Ajaccio, un message fort de l'empereur rappelant que Bastia n'est pas la capitale de la Corse.

La façade occidentale se compose de trois travées et de deux niveaux dans un décor baroque, jouant sur le contraste entre le jaune clair des enduits et le blanc ou gris des reliefs. Le niveau inférieur est marqué par une série de pilastres corinthiens encadrant trois portails, elles-mêmes entourées de marbre gris et surmontées de plaques commémoratives. Les chapiteaux soutiennent une corniche qui court sur toute la largeur. Le niveau supérieur est semblable au niveau inférieur si ce n'est qu'il donne sur des frontons triangulaires brisés surmontés de vases décoratifs pour les collatéraux et d’une croix pour le central. Les niches latérales abritent les statues de saints Pierre et Paul, tandis que la travée centrale dévoile un triplet en plein cintre.

L'intérieur de l'église est baroque à nef unique, dont l’architecture met en valeur la monumentalité de l’autel. La nef est longue et encadrée par de hauts piliers corinthiens à chapiteaux dorés et par des arcs en plein cintre. Le plafond est décoré de caissons et de motifs en bois polychrome, avec une coupole richement sculptée et ornée de motifs floraux et héraldiques. Le chœur est surélevé et dominé par un imposant retable doré, où se dresse un grand crucifix entouré de statues et de chandeliers. De part et d’autre, des vitraux colorés décorent le chœur. L’autel, en marbre travaillé et décoré de fleurs blanches, est recouvert d’un parement brodé, la cloison du chevet de l'église semble être à faux fond, puisqu'on y voit une vierge incrustée dans le mur derrière le chœur absolument sublime qui semble contempler les fidèles eux-mêmes.


Oratoire de la confrérie de Sainte Croix
Oratoire de la confrérie de Sainte Croix.2
Oratoire de la confrérie de Sainte Croix.3
Oratoire de la confrérie de Sainte Croix.4
Oratoire de la confrérie de Sainte Croix.5

Oratoire de la Sainte Croix, l'un des plus luxueux de Corse

Je n'ai pris aucune photo de l’extérieur de l’oratoire, mais il faut imaginer une devanture sobre et relativement étroite. Ses murs sont enduits d’un jaune clair, ornés du dessin de deux piliers blancs soutenant une petite corniche bien réelle. Cette corniche surplombe une petite fenêtre carrée, dont l’encadrement est simplement dessinée.

Dédié à l'Annonciation, l'oratoire de la confrérie de Sainte-croix a été construit en 1543 dans le style rococo Français. L'intérieur abrite la chapelle du Très Saint Crucifix des Miracles, le Christ noir, découvert en mer, en 1428, selon la légende, par deux pêcheurs.

La confrérie de Sainte-Croix, qui administrait l'hospice génois Saint-Nicolas, est la plus ancienne de Bastia. L'église a été classé monument historique en 1931.

Description intérieure :

Le contraste est grand entre l’apparence insignifiante de l’extérieur et la somptuosité inattendue que l’on découvre à l’intérieur de l’édifice que nous gagnons par un étroit passage et une petite cour irrégulière. L’oratoire est de nobles proportions. L’exceptionnel décor de stuc doré, qui recouvre la voûte et les murs, est de style «barochetto».

Les stalles en noyer sculpté et les prie-Dieu qui bordent le chœur ont été réalisés en 1773, le pavement est en motif de damier, noir et blanc classique, De part et d’autre de la nef, placées dans deux niches murales, on remarquera deux statues, Dans la nef sont accrochées deux grandes toiles, de format rectangulaire vertical. Celle qui est visible sur l'une des photos représente «Le lavement des pieds» le moment iconographique où Jésus lave les pieds de ses disciples. C'est une œuvre de Saverio Farinole, le peintre qui a également peint le médaillon de la voûte.

Le chœur en marbre est richement orné, avec des motifs couleur or au plafond et aux murs qui semblent représenter des roses et d'autres motifs abstraits, sur l'autel, il y a des cierges ainsi qu'un crucifix au devant d'un tableau.

En face de l'entrée, il y a la chapelle du crucifix des miracles et son grand Christ noir qui aurait été retrouvé en 1428, flottant au large du port, par deux pêcheurs bastiais. On y voit un ornement de type ''gloire'' de bois doré placé derrière le crucifix. La voûte à caissons de la chapelle est ornée de stucs et de peintures absolument magnifiques, il paraît que par le passé, les murs de la petite chapelle étaient eux aussi ornés de tableaux comme ceux-là. Malheureusement, ils auraient été détruits lors des bombardements de la flotte anglaise.


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1 Voyage | 81 Étapes
Bastia, France
15e jour (14/08/2025)
Étape du voyage
Début du voyage : 31/07/2025
Liste des étapes

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