Ce qui est sublime en Corse, c’est qu’il existe des petits coins comme celui-ci, nichés entre deux falaises, au creux du maquis, qui semblent complètement préservés de l’empreinte humaine… Alors qu’en réalité, il n’en est rien, ah ah ! J’ai même dû demander le chemin à un restaurateur, ne parvenant pas à trouver le sentier. En réalité, le sentier, je l’avais bien vu, mais mon cerveau ne voulait pas croire que je devais longer à même les roches mouillées au bord de l’eau pour arriver à cette crique ! En bref, un décor de rêve où mon père et moi nous sommes arrêtés sur un morceau de falaise la surplombant un petit moment pour contempler le paysage avant de repartir, regardez ce sable étincelant, il ne semble pas avoir l'ombre d'un déchet, ça fait plaisir à voir.
Origines et évolution historique :
Le corse est une langue romane issue du latin populaire, arrivé en Corse lors de la conquête romaine en 259 av. J.-C. Avant cette romanisation, l’île parlait vraisemblablement un idiome pré-indo-européen, influencé par le grec et le ligure. Sous domination romaine, la Corse fut « progressivement terre latine » et le latin parlé par les insulaires divergea à travers les vallées pour former la future langue corse.
Au Moyen Âge, la Corse resta proche de la Toscane : la République de Gênes utilisait le toscan comme langue administrative, tandis que les colons ligures (génois) parlaient le génois et ont légué au corse des mots comme piola (hache) ou carrughju (rue). Cette « diglossie toscan-corse » a perduré plusieurs siècles, chaque langue ayant son espace propre. Ainsi le corse médiéval est resté très voisin du toscan, avec de nombreuses racines latines préservées, et plusieurs dialectes internes : traditionnellement, on distingue le corse cismuntincu (Nord) de l’ultramuntincu (Sud), avec une zone de transition autour d’Ajaccio.
À l’époque moderne, le corse était encore la langue parlée du peuple, tandis que l’italien était la langue écrite et officielle. Par exemple, la constitution corse de 1755 rédigée par Pasquale Paoli était en italien, et Paoli lui-même affirmait que le corse n’était qu’un « patois » de l’italien. Cette situation a duré jusqu’au milieu du XIXᵉ siècle : la date-clé est 1852, quand le français devint la seule langue officielle et l’italien en fut proscrit. Sous le Second Empire et la IIIᵉ République, l’enseignement du français s’est généralisé, et le corse a peu à peu été concurrencé dans la vie publique, même si sa richesse dialectale et ses nombreuses variantes lui ont conféré une certaine unité interne.
Caractéristiques linguistiques principales :
Le corse est une langue romane de la branche italo-romane, étroitement apparentée au toscan et aux parlers d’Italie centrale. Sur le plan typologique, c’est une langue à structure sujet-verbe-objet (SVO) à flexion accusative, comportant deux genres grammaticaux et la concordance en nombre comme l’italien (par exemple, les noms masculins terminent souvent par -u au singulier et -i au pluriel, les féminins par -a → -e). Les articles définis sont u (masculin singulier), a (féminin singulier), i (masculin pluriel) et e (féminin pluriel), le pluriel ne s’obtient jamais par ajout d’un -s final comme en français, mais par changement de voyelle finale (généralement -a → -e, -u → -i). La morphologie verbale et nominale est riche, avec des conjugaisons assez similaires à l’italien.
Phonétiquement, le corse se caractérise par des mutations consonantiques héritées du toscan médiéval : certaines consonnes initiales alternent entre forme « forte » (sourde) et « faible » (sonore) selon le contexte (par exemple, pippone → bibbona « biberon »). Ce phénomène est surtout marqué au nord de l’île et diminue vers le sud. À l’inverse, dans environ un quart nord-est de l’île les groupes <st> se prononcent « cht » (p.ex. Bastia prononcé [bachtja]) et les voyelles a, e, o qui précèdent une m ou n tendent à être nasalisées (ainsi pane devient [pan-nè], et cumu [komu] donne [kũmu]). Le corse a un accent d’intensité (tonique) variable sur la syllabe finale ou la pénultième, comme en italien. De façon générale, bien que le corse présente des traits propres (notamment dialectaux très marqués), il reste très proche de l’italien standard sur le plan phonétique et grammatical, permettant une bonne compréhension mutuelle avec les Italiens.
Statut et usage actuel en Corse :
Au plan légal, le français demeure la seule langue officielle en France, mais le corse est reconnu par les institutions corses. L’Assemblée de Corse a adopté en 2013 une proposition de statut de co-officialité pour le corse, et la langue corse figure dans la loi organique de 2002 comme matière d’enseignement dans les écoles de l’île. Concrètement, la loi prévoit l’enseignement du corse « dans l’horaire normal des écoles maternelles et élémentaires », à moins que les parents n’y renoncent expressément. Le corse peut aussi être choisi en option dans les collèges et lycées, et l’Université de Corse dispense désormais des formations en langue et culture corses. Des médias et associations œuvrent par ailleurs à sa promotion.
Malgré ces efforts, la transmission intergénérationnelle reste fragile. Seules 15–20 % des familles où les grands-parents parlaient corse ont continué à le transmettre aux enfants, tandis que la majorité des jeunes le comprennent sans le pratiquer activement. En 2021, on comptait environ 130 000 locuteurs déclarés en Corse, sur 350 000 habitants, avec une forte baisse chez les plus jeunes. Néanmoins, le renouveau culturel depuis les années 1970 a suscité des prises de conscience et de nombreux projets de revitalisation (classes bilingues, publications littéraires, étiquetage bilingue, initiatives numériques…).
Lexique thématique :
Nature et environnement
arbu – arbre. Sò mondu à l’ombra d’un arbu. (« Je m’endors à l’ombre d’un arbre. »)
muntagna – montagne. A muntagna hè alta. (« La montagne est haute. »)
mare – mer. U mare hè turchinu. (« La mer est turquoise. »)
sole – soleil. U sole hè bellu oghje. (« Le soleil est beau aujourd’hui. »)
fiore – fleur. Quellu fiore hè scarlattu. (« Cette fleur est écarlate. »)
Famille et proches
babbu – père. Babbu và à la campagna. (« Papa va à la campagne. »)
mamma – mère. A mamma hè ghjunta. (« La maman est arrivée. »)
fratellu – frère. U mo fratellu hè ghjovanu. (« Mon frère est jeune. »)
sorella – sœur. A me sorella hè cura. (« Ma sœur est sage. »)
zii – oncle. U mè ziu hè vechju. (« Mon oncle est âgé. »)
Émotions et sentiments
allegrìa – joie. A maronna ci porta allegrìa. (« La mer nous porte de la joie. »)
tristu – triste. Ella hè trista oghje. (« Elle est triste aujourd’hui. »)
bravu – fier, courageux. Semu tutti bravi. (« Nous sommes tous courageux. »)
amore – amour. Aghju parechju amore per tè. (« J’ai beaucoup d’amour pour toi. »)
paura – peur. Tengu paura di u scuru. (« J’ai peur du noir. »)
Extraits littéraires et chansons :
Le poète Santu Casanova décrit l’hiver insulaire dans son poème L’invernu in Corsica :
« Tutte le nostre muntagne… Lucenu cume vitrate. »
« Toutes nos montagnes… brillent comme des miroirs. »
L’hymne traditionnel Diu vi salvi, Regina est également emblématique :
« Diu vi salvi, Regina… Al Paradisu. »
« Que Dieu vous garde, Reine… jusqu’au Paradis. »